Dans un arrêt récent de la Cour de Cassation (2014), la haute cour a confirmé, une nouvelle fois, sa position constante sur le thème de la pré-quantification.

Sachez que dans le domaine juridique, cette date de 2014 peut être considérée comme récente, le temps judiciaire étant souvent différent du temps de l’action. En effet, dans notre exemple d’aujourd’hui, la cour statuait sur une décision d’une cour d’appel de 2012, jugée initialement par un conseil de Prud’hommes en 2008.

Ce cheminement est particulièrement long et il est donc important de pouvoir aujourd’hui s’appuyer sur de multiples décisions qui permettent aux conseils de prud’hommes et aux cour d’appel de statuer sans risque de se voir sanctionner par la plus haute juridiction.

Dans cet arrêt de 2014, la Cour s’intéresse à une décision d’une cour d’appel qui n’avait pas donné raison à un salarié qui demandait le paiement d’heures travaillées mais non payées du fait d’une application d’un temps théorique, pré-quantifié à l’avance.

Pour justifier sa décision, la cour d’appel indiquait que le métier de distributeur de publicité relevait d’un régime spécial instauré par une convention collective nationale qui permettait de s’exonérer des mesures de contrôle et d’application des règles usuelles du code du travail en matière de rémunération du temps travaillé.

La cour d’appel affirmait également que le fait de signer une feuille de route qui indiquait précisément la mission a effectuer et la rémunération qui serait versée pour elle, sachant ensuite que cette rémunération était effectivement versée, engageait le salarié qui avait donc accepté, en toute connaissance de cause, cette mission.

Or, la Cour de Cassation a rappelé qu’en statuant ainsi, la cour d’appel avait violé le droit étant entendu que l’analyse du temps de travail ne peut se limiter à un temps pré-quantifié par l’employeur.

Par ailleurs, la signature d’une feuille de route ne saurait engager le salarié et l’empêcher de revendiquer ensuite, le paiement du temps réellement travaillé.

Personne ne peut, en effet, renoncer à un droit par un contrat. La signature de la feuille de route n’engage le salarié que sur le fait qu’il l’a reçu mais aucunement sur l’acceptation des conditions de sa rémunération.

La Cour de Cassation a donc annulé l’arrêt de la cour d’appel en rappelant les règles de droit à savoir,

Que :

 » la charge de la preuve des heures complémentaires ne pèse pas sur le salarié ; qu’il lui appartient seulement d’étayer sa demande par la production d’éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre en apportant, le cas échéant, ses propres éléments sur les horaires effectivement réalisés « 

Que :

« la quantification préalable de l’ensemble des missions confiées et accomplies par le distributeur, dans le cadre de l’exécution de son métier, en fonction des critères associés à un référencement horaire du temps de travail prévue par l’article 2.21.2 du chapitre IV de la convention collective nationale de la distribution directe, ne saurait à elle seule satisfaire aux exigences de l’article L. 3171-4 du code du travail ».

Il s’agit dans cet article du code du travail d’édicter les règles de traitement des litiges relatifs aux heures de travail :

« En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable. »

La Cour de Cassation précise ensuite que :

« Pour débouter Madame Y… de sa demande en paiement d’heures complémentaires, exclusivement sur la quantification préalable des missions confiées ou accomplies, dont les feuilles de route n’étaient que la reprise, la cour d’appel a violé les textes susvisés »

La Cour de Cassation réaffirme également qu’il en est de même pour les indemnités kilométriques.

Cette décision s’applique parfaitement aujourd’hui avec le recours au temps théorique dit « repère » parfois utilisé avec la badgeuse en cas d’invalidation du temps mesuré, ou du nombre de kilomètres imposé par l’entreprise à l’intérieur d’un secteur par exemple.

Pour terminer, nous vos rappelons qu’une rubrique spécifique de notre site permet d’avoir accès à une large jurisprudence, l’entreprise ayant eu à traiter de nombreux contentieux dans de nombreux domaines.

(Cf : Arrêt de la Cour de Cassation du 24 septembre 2014).


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